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Une analyse de pratiques pédagogiques en 1ère STAV : une pluri « chimie du sol » à l’EPLEFPA de Cibeins

EPLEFPA de Cibeins, Auvergne-Rhône-Alpes

Domaine de Cibeins

01600 Misérieux

Tél : 0414088822
Site web : https://www.cibeins.fr/
Responsable : Jean Yves CORTEY , jean-yves.cortey@educagri.fr
Rédacteur de la fiche : Brigitte RINGEVAL (en collaboration avec Christian PELTIER), Référente EPA2 AuRA et enseignante d’agronomie

DESCRIPTION SYNTHETIQUE DE L’ACTION

Le contexte de l’action

L’EPL s’est doté d’une cellule d’analyse de pratiques pédagogiques en 2018, née de l’opportunité d’une expérimentation régionale dont l’EPL a été lauréat et qui était accompagnée par la Bergerie Nationale. Cette expérimentation s’est inscrite à la suite d’une précédente expérimentation pilotée, elle, par l’ENFA et intitulée « passer de groupe à équipe ». Cette succession a été bien accueillie. La pilote, Catherine, est une enseignante de français et elle s’est engagée avec un noyau d’enseignantes de matières générales de Seconde GT. Si Catherine enseigne dans plusieurs filières, elle est professeure principale en classe de Seconde GT. Elle n’est pas seule à faire le même constat : le public change ; le niveau baisse, il est hétérogène et l’envie d’apprendre relative. A la base, l’équipe de Seconde est soudée, elle partage ses cours, échange beaucoup de manière informelle (par mails, en salle des profs…) et mobilise sur sa propre initiative, des méthodes ‘anciennes’ connues comme la méthode Freinet, la classe puzzle, la classe inversée… pour stimuler les apprentissages. Pour cette équipe, l’engagement dans ces expérimentations traduit de manière claire une envie de se remettre en question sur sa posture et ses méthodes. L’expérimentation de 2018, axée pédagogie/didactique, a été une opportunité pour trouver ses solutions en étant accompagnées et en utilisant des activités pédagogiques internes. L’expérimentation, encadrée par la Bergerie Nationale, a permis d’officialiser le collectif et son intention auprès de l’équipe de direction et de commencer à professionnaliser les participants, dont Catherine, la pilote, pour qu’à terme elle puisse de manière autonome animer des ateliers de formation au sein de l’EPL.

Parallèlement, EPA1 a été lancé avec comme piliers notamment la rénovation des référentiels avec ses d’apprentissages plus complexes et son approche capacitaire. Mettant en avant autant le « produire autrement » que le « enseigner autrement », EPA1 a poussé naturellement certains enseignants techniques, dont la référente EPA elle-même, à intégrer le collectif d’analyse de pratiques pédagogiques. La Bergerie nationale a formé le collectif aux fondamentaux de la pédagogie et de la didactique, les a fait mettre en exercice et a progressivement donné de plus en plus d’autonomie à Catherine. Aujourd’hui, Catherine est considérée comme ayant atteint un bon niveau de professionnalisation. Le collectif se réunit 2 fois par an, sur des plages banalisées par la direction, autour d’une activité pédagogique à analyser, menée seule ou en équipe selon les cas. Chacun y vient sur la base du volontariat ; on y retrouve le noyau dur d’origine. Depuis 2014, la dynamique continue ; les ateliers d’APP créent de la cohésion et aux dires des enseignants, permettent de « parler du cœur de son métier », de « s’arrêter entre collègues », de « ne pas être seuls » et de « réellement progresser grâce à un regard extérieur et professionnalisé » d’autant que « ça a lieu sur place ». Les moments d’APP sont considérés comme des moments forts de la vie de l’établissement.

Catherine a souhaité présenter la PLURI « chimie du sol » en 1ère STAV (PLURI n°4 du S1) car elle voulait travailler une activité qui engage une matière générale pour « équilibrer les matières générales et les matières techniques ». Cette PLURI présentait l’avantage d’engager les disciplines « agronomie » et « chimie ». L’équipe a fait le choix de la positionner, sur 5 séances de 2h30, entre janvier et février, soit au passage au 2ème semestre de 1ère

Les enseignants, Claire et Ghislain, ont monté la PLURI au moment de la réforme du référentiel et ils la reconduisent d’une année sur l’autre.

Ghislain & Claire, les deux cobayes

L’analyse de pratiques pédagogiques se réalise une fois que l’activité est terminée et en permet finalement une évaluation. Il va de soi que si les enseignants sont transparents sur leur travail et leurs intentions, l’analyste, lui, reste bienveillant. Notons que la majorité des équipes de l’EPL a une habitude et une appétence pour le travail en PLURI ; notons aussi que l’entente est bonne entre les deux enseignants-cobayes de l’APP présentée ici, on sait que cela est toujours un facteur facilitant.

Le déroulement de l’atelier d’APP

L’analyse de pratique pédagogique telle qu’elle est pratiquée à Cibeins s’inscrit dans la suite des travaux de Michel Fabre (2006) et Bernadette Fleury (2008, 2009), dans une approche constructiviste problématisée et mobilise l’instruction au sosie (Réseau Enseigner autrement, 2009) pour faire expliciter les pratiques enseignantes. L’instruction au sosie est complétée par le recours à des traces de l’activité des enseignants (conception de séquence, organisation de séquences, …) et des apprenants (productions diverses, évaluations).

L’atelier d’analyse de pratique pédagogique s’est déroulé cette année 2021/2022 en 2 phases

Phase 1 – Le travail de l’animatrice de l’atelier, en amont

Il faut s’imprégner de l’activité sans l’avoir soi-même organisée et en en n’étant pas spécialiste. Pour cela, Catherine a recours, par mail et de vive voix, à des entretiens de type « instruction au sosie ». Elle a interrogé Claire et Ghislain séparément à l’aide de 4 questions

  • Qui sont les apprenants ? Comment ça se passe entre vous ?
  • Que voulez-vous qu’ils apprennent vraiment ?
  • Quel savoir est institutionnalisé ? Quelle mobilisation est prévue ?
  • Quel est le déroulement pédagogique ?

Elle demande les supports de cours, les protocoles de TP, les productions des élèves en classe et les évaluations s’il y en a ; elle pose autant de questions que nécessaire pour saisir l’ensemble. Sa posture de « novice » (comme elle se définit elle-même) est efficace pour cibler et lever les implicites.

Puis elle reboucle avec les référentiels, s’efforce de distinguer les savoirs (les concepts qui permettent de raisonner et les savoirs informatifs disciplinaires), elle identifie les points forts de l’organisation d’équipe, elle regarde la scénarisation pédagogique, elle sent le fonctionnement de la classe… Elle essaie de comprendre ce que veulent faire les enseignants, ce qu’ils visent comme apprentissages, ce qui a été fait avant et ce qui est prévu ensuite, ce qu’ils organisent réellement, comment ils se répartissent leur place, ce qu’ils évaluent, le travail et les consignes qu’ils donnent aux élèves, comment la durabilité s’invite…

Elle s’interroge… Et elle finit par arriver à une analyse.

Cette phase est fastidieuse car il y a un va-et-vient continuel entre l’analyste (Catherine) et les enseignants-cobayes (Claire et Ghislain). Un retour de mail rapide de la part des enseignants-cobayes permet de ne pas bloquer le travail et d’expliciter un bon nombre de points. A certains moments il est indispensable de se voir en présentiel, soit parce que les informations nécessitent explications (et vulgarisation), soit parce que les enseignants ne souhaitent pas avoir à tout formaliser par écrit (par exemple Ghislain a dû expliquer certaines choses à l’animatrice, de vive voix, car c’est plus simple et rapide que de tout détailler par écrit). En même temps, cette phase prédispose les enseignants à être capables d’entendre publiquement un regard posé sur leur travail qui jusqu’à ce moment-là est encore privé ; ils voient bien que finalement ce qui est évident à eux, pensé par eux ne l’est pas pour tous, certaines questions ‘grattent’ un peu…

L’analyse de Catherine est confrontée à celle de la référente EPA AuRA qui travaille dans le même EPL ; celle-ci a réalisé de son côté le même travail à partir des documents transmis. Les deux confrontent leur vision, Catherine s’exprime en 1er. Une première validation est donnée. Puis on confronte le travail au regard de Christian Peltier de la Bergerie Nationale qui reste disponible en appui. Dans l’ensemble, quelques détails sont affinés mais l’analyse de départ s’avère pertinente.

La référente EPA qui est enseignante d’agronomie propose de réaliser un schéma conceptuel sur la chimie du sol (sujet dont il est question ici) que Catherine ne se sent pas capable de faire.

Enfin l’analyse est formalisée sur un diaporama qui sera celui diffusé le jour de la tenue de l’atelier.

Une date est fixée, la demi-journée est banalisée par le directeur-adjoint, pour les volontaires qui veulent y participer. 9 personnes en plus des 2 enseignants-cobayes, de la référente EPA et de Catherine participent à cette séance.

Phase 2 – Le déroulement de l’atelier d’APP

L’atelier se déroule en 4 temps

  1. Appropriation du sujet par le collectif

L’instruction au sosie est reproduite devant tout le groupe pour lui permettre de s’approprier le sujet et cela avec les 4 mêmes questions préparatoires. Claire et Ghislain s’expriment chacun à leur tour. Puis les participants peuvent les interroger pour avoir des explicitations complémentaires. L’animatrice est vigilante sur l’expression des uns et des autres : on ne commence pas l’analyse, on demande seulement des éclaircissements.

Instruction au sosie par Catherine, animatrice

Claire qui travaille déjà avec la référente EPA est habituée aux travaux de groupe et aux modélisations, qui essaient de refléter la complexité des situations de terrain. Ghislain découvre la PLURI avec l’agronomie et il reconnaît « ne pas être dans sa zone de confort : il a du mal à schématiser comme le fait Claire, il aime bien les cours avec des I.II.III. des 1.2.3. des a.b.c… et avec Claire, il a découvert les ronds, les paperboards, les couleurs… Il aime bien avoir des tiroirs et ranger les choses dans les tiroirs mais là ça ne se passe pas comme ça, il faut décloisonner ; et puis le sol n’est pas son outil habituel de chimiste »… Le collectif semble comprendre la scénarisation pédagogique, alternant les terrains : salle pour s’approprier le « sol comme ressource commune » et le concept de « fertilité », terrain pour observer la fertilité physique et biologique (via la méthode Shepherd), laboratoire pour travailler la fertilité chimique (pouvoir tampon et Capacité d’Échange Cationique). Le collectif arrête de poser des questions. Pour les deux enseignants, la collaboration des matières ‘agronomie’ et ‘chimie’, qui n’existait pas avant, est une plus-value. En agronomie si la PLURI n’est pas nouvelle, le binôme, lui, est nouveau ; dans l’ancien STAV, il existait avec d’autres matières comme la philosophie, l’écologie-biologie, la zootechnie, l’économie… Claire la voit comme « le prolongement du cours » et elle reconnaît que « la fertilité chimique est plus difficile à enseigner car elle n’est pas visible et que les élèves ont des blocages sur des notions de chimie ». Ghislain reconnaît que comme « avec la rénovation il a gagné des heures de PLURI, il a pu déplacer des points du cours sur la PLURI » et il semble y gagner en légitimisation de sa matière quand il dit qu’« il y a des intérêts à comprendre la chimie, la chimie n’est pas hors sol même si elle s’apprend en labo… il y a des utilités concrètes à apprendre/comprendre la chimie ; les élèves voient des implications pratiques dans le monde réel grâce à ça ».

Puis Claire conclut cette phase ainsi : « avec cette PLURI on travaille la fertilité du sol, le concept est la fertilité du sol, si les élèves comprennent le concept de la fertilité, ils ont tout compris ».

2.Le collectif est mis au travail en mobilisant des outils de positionnement pédagogique

 Les participants vont passer à l’étude de l’activité. Pour les guider, Catherine utilise 5 questions

  • Avec cette activité, que font les enseignants ?
  • Que font les apprenants ?
  • Quel type de savoir est en jeu ?
  • Quel est le processus pédagogique dominant ?
  • Quelles pistes d’amélioration proposeriez-vous ?

Pour ce faire, ils se répartissent en groupe de 4 et réinvestissent des outils déjà connus (travaillés lors d’ateliers précédents) (les nouveaux participants sont formés par le groupe) comme le triangle pédagogique de Houssaye, la diversité des formes pédagogiques de Fleury, les 3 familles pédagogiques-les 4 processus d’après Houssaye, les savoirs en jeu et information-connaissance-savoir d’Astolfi.

Les groupes au travail et leur production paper-board

La restitution se fait sur paper-boards exposés au mur et commentés. Les 2 groupes livrent la même analyse : la posture de Claire et de Ghislain n’est pas la même, Ghislain est dans l’ ‘enseigner’ et Claire vise l’ ’apprendre’ ; ils identifient que Ghislain est uniquement dans des savoirs « informatifs » alors que Claire « mixe savoirs conceptuels (concept de fertilité du sol) et les savoirs informatifs » ; ils ont aussi remarqué que « le pilotage des séances n’est pas mutualisé en mode PLURI : il y a un ‘dominant’, l’autre fait acte de présence ou est auxiliaire logistique », il explique que « le sens de la PLURI n’est sans doute pas évident pour les élèves : qu’est-ce que ça représente concrètement pour eux d’apprendre cela ? ».  Ainsi les deux groupes proposent les mêmes pistes : « contextualiser la PLURI, le concept de la chimie du sol, en posant une question professionnelle » et « piloter à deux voix les séances pour que les deux disciplines se répondent explicitement en temps réel ».

Catherine s’étant elle-même prêtée à l’exercice (que font les uns et les autres ? quel type de savoir est en jeu ? quel processus est dominant ?) donne sa version pour conclure l’exercice ; cette institutionnalisation est essentielle car elle fait partie du processus apprenant du collectif qu’elle vise à former.

Phase d’institutionnalisation

 3. L’analyste livre son analyse avec le diaporama préparé

Catherine a d’abord souligné ce qui était intéressant :

  • Un cours qui trouve sa place dans un processus de formation : il arrive en janvier/février à la suite de différents apports notamment conceptuels sur ‘Agroécosystème’, ‘Matières organiques’ en agronomie-biologie et ‘pH’ en chimie mais aussi informatifs
  • Un cours structuré en différentes séances au contenu identifié
  • Une collaboration des élèves (« maintenant ça se passe très bien, la mayonnaise a pris, d’un côté comme de l’autre on y va pour apprendre ; les élèves sont curieux, il se passe toujours quelque chose, le groupe veut tout savoir et quand je veux mettre sous le tapis, ils viennent chercher ce que je ne voulais pas dire » dit Ghislain ; « au début ils étaient désemparés mais maintenant ils aiment travailler en groupe et s’autonomisent, ça se passe bien avec eux, je suis satisfaite » dit Claire)
  • Des enseignants qui ont le soin de laisser des traces normalisées aux apprenants, ce qui constitue un cours complet et non dispersé.

Ensuite elle livre ses interrogations et ses propositions

  • 2 enseignants avec des profils et des postures différentes

Ici si la PLURI est « chimie du sol », pourquoi cibler le concept de ‘fertilité globale du sol’. Pour Catherine, introduire la PLURI par le concept de fertilité et y associer son schéma conceptuel ne sont pas forcément l’attente. Elle se demande même si travailler tous les aspects de la fertilité

  • (physique et biologique), qui du reste n’impactent pas l’enseignant de chimie, ne rendrait pas le contenu ultra dense, trop dense. Elle ose poser la question : pour 6 séances, l’objectif n’est-il pas trop ambitieux et éloigné de l’intention première de la PLURI ?

L’angle d’approche est donc questionné ; Catherine proposera de se recentrer sur ‘chimie du sol’ et suggère d’ouvrir la PLURI par un texte axé sur la chimie ou alors par une commande professionnelle en ‘chimie agricole’ (par exemple, commander des engrais, corriger un pH trop acide d’une parcelle, corriger une carence minérale…).

Ainsi le concept n’est plus ‘fertilité du sol’ mais un autre. Catherine, aidée de la référente EPA2 qui est agronome, livre un potentiel schéma conceptuel centré sur ‘chimie du sol’.

L’approche est intéressante car elle positionne le raisonnement sur le processus naturel du cycle de la matière organique (organisation -> minéralisation -> organisation). Cela permet de sortir des représentations que 1- la chimie est mauvaise car elle viendrait des engrais de synthèse et 2- la chimie est une affaire de labo, elle s’opère dans des tubes à essai.

De plus, nous le verrons plus loin, ce schéma ouvre des potentiels de raisonnement en matière de durabilité.

Les enseignants reconnaissent les écueils qu’ils justifient : 1- difficulté pour Ghislain de trouver sa place face à l’agronomie et face à un objet qu’il ne connait pas (le sol) 2- la suppression, jugée pénalisante, par la réforme du STAV des PLURI agronomie-écologie qui permettaient, sans prendre sur les cours, de travailler le sol sous toutes ses dimensions. Ainsi par facilité pour chacun, les enseignants ont finalement reproduit la PLURI quasiment à l’identique de ce l’agronomie faisait avant (fertilité globale)…Ils ne sont pas allés sur une reconception de la PLURI (c’est-à-dire partir du thème ‘chimie du sol’), ce que préconisait la réforme.

Catherine comprend cette explication. Elle a prévu sa réponse car l’instruction au sosie lui a permis de l’anticiper : pour rassurer les enseignants, elle ouvre l’idée de la synergie entre INTER- et PLURI-disciplinarité. La pluridisciplinarité offrirait l’espace collectif où construire quelque chose de commun, visant un objectif d’apprentissage commun et mené à deux… Cela n’empêche pas les enseignants de travailler en amont et/ou en aval de la PLURI des objectifs propres ; ainsi elle propose à Claire de travailler son concept de fertilité globale et à Ghislain de travailler ce qu’est une solution tampon en amont de la PLURI – et non sur la PLURI – pour se concentrer sur les objectifs communes (ici « pouvoir tampon du sol » et « Capacité d’Echange Cationique » lors des séances de PLURI.

Christian PELTIER insiste alors sur la distinction nécessaire entre inter- et pluri-disciplinarité, pour avoir une vision claire de ce qui est fait par les uns et par les autres et des apprentissages visés ; cela pourrait prendre la forme d’un mini ruban pédagogique (éventuellement formalisé par un diagramme d’Ishikawa) et permettrait de ne pas se perdre en route, de garder le même objectif commun et que ça soit clair autant pour les enseignants que pour les élèves.

  • Avec 2 profils d’enseignants différents et des objectifs propres et communs, il y a besoin de reconnecter avec des concepts organisateurs (‘durabilité’ «’agroécosystème’ ‘acide/base’…) comme une boite à outils, pour que ce soit clair, que ça fasse sens pour les apprenants ; ces concepts organisateurs auraient été identifiés et construits en amont. Le lien entre la chimie et l’agronomie semble avoir besoin d’être affiné : Les TP proposés sont des réponses à quelles questions ? Où est la problématisation qui amène la mise en enquête par les TP et les observations ? Quelle serait la situation-problème (avec un authentique lien avec l’objectif de la PLURI n°4 du S1) ? Quelle serait la problématisation et les inducteurs de problématisation, autour de quoi cogiter et qui mettraient les élèves en défi ? Quels sembleraient être les enjeux d’apprentissages communs et propres ? A quels obstacles épistémologiques doit-on faire face ?

La DEA, présente à cette APP, ce qui est assez rare pour être souligné, réagit : pourquoi ne pas passer elle-même une commande pédagogique aux apprenants ? Leur suggérer un ‘problème’ au sens ‘une question’) auquel elle est confrontée…

Au-delà de son potentiel problématique, une commande professionnelle contextualisée présente aussi l’énorme atout de donner un sens concret, pratique à la question de la chimie sol, qui, comme le disent les 2 enseignants, « ne se voit pas, ne se touche pas ; cela représente une réelle difficulté pour les jeunes de ne pas pouvoir voir ; l’abstraction nécessaire est une vraie difficulté pour eux ».

  • La durabilité n’est pas encore explicitée dans cette PLURI. EPA2 dit ‘ouvrir le raisonnement des apprenants aux champs des valeurs et de la responsabilité citoyenne’. En STAV, les S1 S2 S3 et S4 posent clairement la question de la responsabilité collective et individuelle vis à vis des ‘ressources communes’… dont fait partie le sol. Catherine propose de prolonger la PLURI par de l’inter-disciplinarité (en agronomie a priori) où Claire pourrait référer la pratique à la diversité des paradigmes (un sol support sous perfusion d’engrais de synthèse, un sol uniquement nourri de matières organiques qui se minéralisent, un sol qui se nourrit à la fois d’engrais organique et d’engrais chimique… ? Quelles sont les places du vivant et de la mécanique dans les processus de fertilisation ?). La grille ESR (Efficience-Substitution-Reconception) apparaît comme l’outil recommandé à mobiliser. L’approche ‘durabilité’ permet de remobiliser et de mettre à l’épreuve le concept ‘Agrosystème / Agroécosystème’ déjà travaillé en amont.

Le temps pour travailler cela serait gagné grâce au déplacement du travail de certaines notions évoquées et travaillées actuellement en PLURI (solution tampon en physique et fertilité en agronomie) et qu’on conseille de reporter sur les cours. En discutant la durabilité de certaines pratiques en matière de fertilisation des sols, la PLURI monterait en raisonnement.

Schéma suggérant comment initier le travail de la durabilité : pour un sol fertile chimiquement, quelle balance entre MO et éléments minéraux ?

4. Une phase d’échanges avec les cobayes et avec le collectif clôture l’atelier

Les enseignants-cobayes sont remerciés de s’être prêtés au jeu. Catherine leur donne la parole pour recueillir leurs impressions sur ce qui vient d’être dit. Ils sont impressionnés qu’on puisse tant parler de leur cas, ils sont intéressés par les propositions qui sont faites et qui leur semblent abordables. Ils apprécient la bienveillance autour de la table.

Les autres collègues s’expriment à leur tour ; on remarque que certains se projettent sur leur propre cas, qu’ils s’approprient des éléments de l’analyse, le processus est-il enclenché pour eux ? La suite nous le dira si par exemple, ils en viennent à solliciter leurs collègues pour mettre en œuvre une telle activité, voire proposer une de leur séquence ou séance pédagogique pour un nouvel atelier d’APP.

La schématisation interpelle toujours : elle parait difficile à réaliser mais aidante comme une photo qu’on a sous la main ; un concept schématisé fait consensus.

La DEA découvre l’atelier d’APP pour la 1ère fois : « avec cette APP, je vois le travail de pédagogie que vous faites, j’ai compris qu’on pouvait être de connivence. Je peux vous soumettre une question professionnelle, ça serait plus alléchant et ça pourrait donner du sens à ces apprentissages ».

Enfin avant de se séparer, Catherine lance un appel à candidature pour un prochain atelier… pour que l’aventure continue.

3. Analyse critique du rôle de l’APP

L’existence de l’atelier d’analyse de pratiques pédagogiques remonte à 2014. Elle est née d’une expérimentation qui porte des fruits car au-delà de la clôture de l’expérimentation, le travail initié a été poursuivi et est monté en puissance. Des expérimentations, des initiatives dans le cadre d’un dispositif (1/3 temps ; chef de projet, CASDAR, RMT…) peuvent être la porte d’entrée pour initier une dynamique au sein d’un établissement, d’autant qu’elles offrent un accompagnement qui permet de se rassurer et de s’outiller.

L’existence de l’atelier d’analyse de pratiques pédagogiques est un outil pour la formation des équipes éducatives à la rénovation des référentiels, à la conduite de classe et de projets qui produisent des apprentissages aptes à amener l’apprenant à acquérir une puissance d’agir demain, en connaissance de cause et de conséquence. C’est un des axes (action 2 de l’axe II) du plan EPA2. A ce titre, visant la cohésion et la formation de ses enseignants, le PLEPA de Cibeins cite la cellule d’APP dans une de ses fiches-actions.

Il est nécessaire de rappeler l’importance du compagnonnage par une personne plus expérimentée, professionnalisée à la fois sur les questions de transition agro-écologique et de pédagogie/didactique. Ici la référente EPA2 mais surtout la Bergerie Nationale qui est restée fidèle à l’engagement cibeinsois. On peut progresser individuellement mais le faire collectivement est encore plus stimulant et plus efficace. Notons que depuis 2014, Catherine a gagné en compétences ; en 2022, elle est jugée capable de mener des ateliers d’APP en autonomie. Elle a identifié les personnes-ressources qui pourront l’aider (la référente EPA2 et la Bergerie Nationale’). Elle insiste sur le bienfait d’« avoir été portée à l’époque de l’expérimentation ENFA, à la fois par le soutien bienveillant de la directrice-adjointe et par une équipe-classe de collègues soudée ».  Le contexte reste stable par-delà les changements d’équipe de direction. « C’est bien grâce à cette bienveillance et le soutien de la direction et la cohésion de mon équipe que je ne lâche pas l’affaire » avoue Catherine. L’équipe de direction a mesuré l’importance de cette cellule de travail ; elle soutient cette initiative par l’octroi d’une décharge à Catherine, par une mise en valeur à la plénière de fin d’année et par la flexibilité d’emploi du temps accordée aux volontaires souhaitant participer. C’est également une action retenue dans le PLEPA de l’établissement. Ces ateliers d’APP sont un atout fort.

4. Conseil à des équipes pédagogiques

L’expérience menée depuis quelques années déjà à Cibeins montre l’importance d’un collectif. Son périmètre est variable : à ce jour une trentaine d’enseignants et/ou formateurs y ont participé au moins une fois et on y retrouve le noyau dur d’origine qui constitue une ressource en termes de réflexivité sur des activités pédagogiques menées, que ce soit dans des pratiques routinières ou des projets plus extraordinaires. En effet c’est également un lieu de « compagnonnage » entre les plus expérimentés et les plus novices quant à des pratiques réflexives partagées.

Ce genre de collectif est particulièrement appréciable pour donner de la valeur à des actions pédagogiques … et peut être référencé dans le PLEPA ou le projet d’établissement de l’EPL, car il est bien un levier intéressant pour EPA2 via le « enseigner autrement les transitions » et le « bien travailler et le bien vivre ensemble ».

FICHIERS A TELECHARGER

Descriptif : Déroulé́ pédagogique de la pluridisciplinarité « chimie du sol »
Deroule-pedagogique-PLURI.pdf

Descriptif : Diaporama APP « chimie du sol »
Diaporama-APP-Chimie-du-sol.pdf

VIDEOS

Mots-clés : Agroécologie, Analyse de pratiques pédagogiques, Autoformation, Pluridisciplinarité (multi), Professionnalisation, dynamique d’équipe

Voie de formation : Formation initiale
Niveau de formation : IV (Bac pro, Bac général)
Initiative du dispositif : Locale
Structure d’appui : Etablissement National d’Appui
Etablissement National d’Appui : Bergerie Nationale

Référent : Brigitte RINGEVAL ,brigitte.ringeval@educagri.fr

Etat de l’action : Terminée
Nature de l’action : Innovation

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