Résultat des innovations

Enseigner la littérature en s’appuyant sur un projet technique et à l’occasion du Printemps des transitions

EPLEFPA de Cibeins, Auvergne-Rhône-Alpes

Domaine de Cibeins

 01600 Misérieux

Tél : 0414088822
Site web : https://cibeins.fr/
Responsable : Jean Yves CORTEY , jean-yves.cortey@educagri.fr
Rédacteur de la fiche : Brigitte BESSON, référente EPA2 régionale AuRA, Soutien : Christian PELTIER, CEZ-Bergerie nationale ; Béatrice DEGRANGE et Benoît BERGER, Institut Agro Dijon

Chef de projet : Isabelle ERAUD et de Claire DUFFES, enseignantes et porteuses du projet

DESCRIPTION SYNTHETIQUE DE L’ACTION

Le contexte de l’action

Les 2 porteuses du projet dont il est question ici sont enseignantes toutes les deux. Claire enseigne l’agronomie en classes de Seconde G, de bac technologique STAV et de BTS ACSE et PA. Isabelle enseigne l’Histoire-Géographie en classes de Seconde G, de bac G, de bac STAV et de BTS PA et ACSE ; pour la deuxième année elle enseigne aussi le français en 1ère STAV. Toutes les deux coopèrent depuis plusieurs années en EATDD (Seconde G). Elles mènent ensemble de nombreux mini-projets autour de l’arbre et de l’animal, conçus systématiquement sur l’idée d’allier les approches agronomique, culturelle et artistique. Les bilans de fin d’année sont positifs : les jeunes s’y retrouvent et les enseignantes aussi.

Aussi, quand Claire et Isabelle se retrouvent dans la même équipe en 1ère STAV, il est évident pour elles de poursuivre leur coopération, basée sur une bonne entente et une même façon de travailler.

En 2024, les enseignantes sont comme confirmées dans leur approche pédagogique par 3 opportunités qui font écho à leurs choix :

  • Claire anime un projet de développement, dont l’établissement a été lauréat, dédié au retour de l’arbre sur l’EPL et sur son territoire. Elle se place dans un cadre encore plus favorable pour développer l’engagement technique et territorial autour de l’arbre qui la motive et pour lequel l’EPL est identifié depuis quelques années.
  • Isabelle participe à une formation proposée par l’Institut Agro Florac sur la thématique « Comment les arts peuvent être un levier pédagogique pour se relier au vivant ? ». L’idée est de voir comment les arts peuvent sensibiliser les élèves (et les citoyens) à une cause, ici les transitions agroécologiques.
  • Toutes les deux envisagent de déposer un projet dans le cadre de l’action « aides à la pratique artistique » de la Région AuRA qui finance tous les ans des projets artistiques et culturels (financement qui peut se cumuler avec le Pass culture, dispositif national). Elles écrivent un projet qu’elles intitulent « Les arbres et nous ». Cette formulation, sous des abords simples, est engageante : elle pose bien la question de notre relation à l’arbre. L’idée est toujours de travailler conjointement la question de l’arbre en Français et en Agronomie. L’idée est toujours aussi d’apprendre à partir d’une expérience vécue par les jeunes.

Pour ce projet, elles tirent parti d’une mise en contact faite par un de leurs partenaires très impliqué aux côtés de Claire, l’association citoyenne locale « Prenons Racine ». Elles sont mises en relation avec un collectif local d’artistes « Les Particules » qui a monté une pièce de théâtre d’après le roman de Jean

Giono « L’homme qui plantait des arbres » et qui dispose de compétences cinématographiques et littéraires. Dès lors, leur idée est de faire venir ce spectacle à Cibeins et d’organiser autour de cela, toute une activité pédagogique alliant agronomie et culture et arts. Claire et Isabelle ont l’habitude de faire exposer leurs élèves et il en est de même ici : dès le départ, elles imaginent donner à voir la pièce de Jean Giono et le fruit du travail entrepris par les élèves.

En même temps, l’EPL est rattrapé par son agenda officiel EPA2. L’EPL qui ne s’est pas engagé l’année précédente dans l’opération « Printemps des transitions », pensée par la DGER, est fortement attendu cette année-là. Comme la référente EPA2 veut initier un évènement, elle se rapproche de ses collègues. Fixée toute la journée du 4 avril dont une après-midi ouverte à tous les personnels et au public extérieur, l’évènement répond bien au cahier des charges, il est donc déclaré en ligne.

Le déroulement du projet 

Le projet se déroule en plusieurs étapes.

Phase 1 : Ecriture du projet pour se projeter soi-même et déposer une demande de subvention régionale

L’activité a été pensée très en amont, l’année scolaire précédente. Grâce à sa veille, Isabelle a eu vent de l’opportunité d’une subvention de la Région et a pu déposer un dossier à la date demandée. La subvention peut financer des déplacements ou des intervenants. Isabelle a imaginé de quelle façon les uns et les autres (elle, Claire, les élèves, l’association « Prenons Racine » et les artistes) pourraient travailler ensemble. Cela a permis de 1- savoir sur quoi et comment s’engager et 2- aider au devis du collectif « Les Particules ».

Claire et Isabelle exposent leurs attentes réciproquement. Avec la focale « arbre », Claire veut continuer à travailler la conduite des systèmes agricoles et étudier comment l’arbre renseigne, interpelle le fonctionnement global de l’exploitation au regard de ce qui motive l’action de l’agriculteur ; c’est le concept d’agroécosystème qui structure son approche technique et territoriale. Isabelle, qui a le rôle d’enseignante de Français et non plus d’Histoire-Géographie, expose ses objectifs. Ceux-ci sont adaptés au niveau de la filière et des objectifs d’examen ; elle veut travailler le théâtre, le cinéma et l’écriture qui font partie des compétences à travailler pour les épreuves anticipées de Français, tout en mettant les élèves au contact des artistes et en les impliquant dans les créations attendues, car en perspective, elle vise : s’engager dans un projet collectif, appréhender des notions-clefs, appréhender poésie et culture, construire et partager une culture littéraire, artistique et scientifique, développer la créativité, pratiquer différentes formes de langage, développer des compétences de compréhension et d’interprétation des textes et des œuvres littéraires. Ce temps de concertation est important : on sait où on va et où est la place de chacune. Décidemment l’arbre est un bon outil.

Le projet a été déposé le 31 mai 2023 et la validation a été reçue en octobre 2023. Dès lors, Isabelle reprend contact avec l’association et ensemble, ils scénarisent, séance par séance. Ils arrivent à une organisation en 3 ateliers liant les attentes d’Isabelle et les compétences des artistes :

  • Un atelier cinéma où un 1/3 des jeunes apprendra à conduire une interview et sera initié au langage cinématographique et la technique de filmage. Les élèves conduisent le tournage mais ne montent pas la vidéo car cela est trop chronophage (l’artiste le fait de son côté). La vidéo « regard sur la nature » capture les représentations des uns et des autres sur la nature (élèves, enseignants, DEA…) (annexe 1).
  • Un atelier théâtre avec un 1/3 des jeunes. Ils apprendront la mise en théâtre d’un texte, pratiqueront des exercices comme expression corporelle, positionnement de la voix, lecture expressive. Ils préparent et répètent une mise en scène créée à partir de la correspondance de Giono sur sa nouvelle « l’homme qui plantait des arbres » et qui sera jouée par les élèves dans le prolongement du spectacle.

Un atelier d’écriture sur l’arbre où un 1/3 des jeunes apprendront la calligraphie, le rapport à l’écriture (avec des plumes sergent major et des encriers), l’écriture de soi (portrait), à développer son imagination et sa créativité à partir de jeux d’écriture, petits défis posés par l’artiste, et aussi le rapport au monde dans l’acte d’écrire (une séance est menée dans le parc du château). Un jeu d’écriture par les élèves eux-mêmes clôturera une conférence à double voix sur l’arbre entre un artiste et un membre de « Prenons Racine ».

Illustration 1 : les élèves au travail dans les 3 ateliers

Phase 2 : Scénarisation et inclusion des partenaires-artistes « Les Particules »

En décembre, une première séance de PLURI présente le projet à la classe qui l’accueille bien. L’outillage de base est fait autour de 4 concepts « paysage », « agroécosystème », « biodiversité » et « durabilité ». Ce travail se poursuit sur la deuxième séance de PLURI.

En janvier-février, un chantier mobilise les élèves : il faut pailler les haies que les secondes ont planté en EATDD. Le chantier se déroule avec la distribution des consignes et la mise en perspective du chantier (pourquoi pailler, choix et présentation des matériaux disponibles…). Il est très apprécié des élèves de STAV, toujours désireux d’aller sur le terrain. Certains se rappellent avoir déjà réalisé plantation et paillage l’année précédente.

Les 3 séances suivantes (3 fois 2h) sont stimulantes pour les élèves : les artistes sont accueillis et le travail avec eux démarre. On est en mars. Les enseignantes lâchent prise, les artistes prennent en charge les ateliers. Les élèves coopèrent.

Une nouvelle PLURI, juste avant la journée de l’arbre (Printemps des transitions) du 4 avril aborde la haie comme outil de transition des systèmes agricoles. Claire et Isabelle choisissent de travailler à partir d’un reportage de France culture « Le grand remembrement » qui laisse la parole à des hommes et des femmes qui étaient enfants lors du remembrement et qui en expriment l’impact qu’il a eu dans leur vie et dans leur territoire. Des documents visuels sont associés au podcast. Claire a aussi sélectionné 3 études de cas illustrant 3 parcours d’agriculteurs et leur positionnement par rapport aux haies. La grille ESR (outil pour penser la durabilité selon 2 critères : le rapport au vivant & au ressources communes et le mode de gestion des questions qui se posent) est mobilisée pour lire, évaluer ces parcours et les comparer (lien vers une présentation de la grille ESR : https://www.youtube.com/watch?v=UsNEdOa23xU&t=5s%29). Isabelle, enseignante d’histoire-géographie, s’y retrouve et participe aux côtés de Claire qui a choisi de ne pas mettre cette année-là les élèves au contact de son réseau agricole local (déjà sollicité dans une autre classe – BTS – en janvier pour éviter une sur-sollicitation) et de travailler en format papier. Le travail de restitution oral est évalué.

Phase 3 : La journée du 4 avril

La journée du 4 avril est le point d’orgue de l’activité. Les élèves sont contents de retrouver les artistes et de continuer à travailler, ils sont aussi contents de se donner à voir l’après-midi.

L’après-midi débute par une conférence à double voix proposée aux deux classes de 1ère STAV du lycée. Marie Rouge, écrivaine du collectif « Les Particules », propose des lectures de textes qu’elle a sélectionnés dans la littérature francophone et anglophone et qui évoquent des relations intimes entre les hommes, les femmes et les arbres. En écho à ses lectures, Catherine Valin, la salariée de l’association « Prenons racine » retrace les séquences qui, depuis 2018, ont jalonné l’histoire de l’association depuis sa création jusqu’aux actions actuelles. Au démarrage de la conférence, les élèves ont la parole : ils posent des questions à la salariée de l’association « Prenons racine » ; à la clôture de la conférence, après les lectures croisées des deux femmes, les jeunes qui ont suivi l’atelier d’écriture réalisent une performance proposée par Marie Rouge : ils ont 15 minutes pour écrire un texte incluant 5 mots. Les textes créés sont lus en direct et vivement applaudis à la fin de la conférence. C’était un moment de partage, entre fierté et émotions.

L’après-midi se poursuit par la découverte de la vidéo réalisée par le groupe cinéma, intitulée « Pour vous la nature, c’est… ? » (https://www.youtube.com/watch?v=EMhKRnS0ui4) et par un dialogue avec les jeunes autour de cette expérience : comment cela s’est passé, ce qui a été difficile, ce qui a été facile, ce qu’ils en retiennent, le choix des personnes filmées, quelle est la destinée de cette vidéo…

Puis l’après-midi se poursuit par le spectacle. Collègues, familles et partenaires sont invités à y assister au grand amphithéâtre. Les classes de Seconde générale, l’autre classe de 1ère STAV et la classe Terminale G assistent au spectacle avec leurs enseignants de français car ce spectacle est pour eux aussi une opportunité, étant concernés à la fois par les plantations et par l’approche littéraire. Quelques parents d’élèves, des membres de l’association « Prenons Racine » également sont présents, soit une dizaine de personnes extérieures.

Illustration 2 : Lecture croisée (Spectacle de J. Giono.  Les élèves jouent au théâtre)

Phase 4 : L’après « 4 avril »

En Français, le retour de classe se divise en 2 temps :

D’abord l’analyse du spectacle : les différents temps du spectacle, la mise en scène en essayant d’imaginer les intentions des artistes, la dimension politique du texte, le rapport à la nature. Ce travail est institutionnalisé par l’intermédiaire d’un schéma fait par Isabelle au tableau au gré du cours

Ensuite le lien avec la séquence sur la poésie « la poésie et le vivant ». Isabelle veut faire réfléchir les élèves au rôle du poète pour révéler la richesse du vivant, à la relation entre le poète et le vivant, à l’expérience poétique comme un parcours intime dans la nature mais qui a aussi une dimension universelle, à la poésie qui aide à se reconnecter au monde et à la nature. Elle veut aussi analyser avec les élèves comment, dans sa mise en scène, le collectif applique la théorie des correspondances de Baudelaire car un des poèmes étudiés par la classe avant le spectacle était « Correspondances » de Baudelaire. Plus tard, le dernier poème étudié pour l’épreuve orale du bac sera « Mes forêts sont de longues trainées de temps » d’Hélène Dorion.

Arrive le bac blanc de Français. Isabelle l’axe sur la forêt avec un essai sur l’évocation du réel dans les arts et la littérature et une écriture d’invention sur le rôle de la forêt dans notre monde.

Perspective

L’expérience ayant réussi, Isabelle veut la renouveler l’année suivante. L’arbre a toujours du sens pour Claire en agronomie et dans le cadre du projet de développement qu’elle anime… et il en a toujours pour Isabelle. Celle-ci est en train de ré écrire un nouveau projet à déposer d’ici la fin du mois de mai. Elle le veut plus ambitieux. Intitulé « Raconter le vivant », elle le voit comme ceci : la classe sera divisée en 3 groupes 1- un groupe atelier cinéma avec écriture d’une fiction, puis tournage et montage avec les élèves, 2- un groupe atelier d’écriture pour écrire une fiction et 3- un groupe arts plastiques pour construire et exposer des réalisations à partir du végétal. Les productions des élèves seront présentées lors de prochaine journée de l’arbre, l’année suivante. Le partenaire extérieur resterait le collectif « Les particules ». Actuellement, il finalise son devis.

Analyse critique de l’action

 Une interconnaissance à l’origine du projet ou le dialogue entre disciplines

Le projet arrive après 4 ans de travail interdisciplinaire entre les 2 enseignantes. Il a commencé par des mini projets en EATDD et progressivement la relation de travail s’est construite. Les 2 enseignantes sont toutes les deux investies dans les ateliers d’analyse de pratiques pédagogiques qui s’organisent 2 fois/an au sein de l’EPL ; elles partagent les mêmes intérêts sur « comment faire apprendre » et il est évident que cela soude. Elles envisagent leurs enseignements comme interdisciplinaires, l’une autant que l’autre.

Il ne nous échappe pas non plus qu’ici, nous avons à faire à une enseignante d’Histoire-Géographie/Français pour qui EPA2 permet que les matières générales qu’elle enseigne trouvent davantage de sens auprès des jeunes de lycée agricole. De nombreuses thématiques en histoire, géographie, EMC ou français renvoient aux questions posées par EPA 2 : quelle est le rapport homme-nature ? Comment évoluent les gouvernances dans les territoires ? Comment le paysage nous raconte notre rapport au monde ? Comment, en tant que citoyen français et européen, je peux agir dans ce monde par mes orientations et pratiques professionnelles, mon engagement dans des collectifs, mes votes ? Comment ma voix, ma parole peut-elle être audible et partagée avec les autres, y compris ceux avec qui je ne suis pas d’accord ? Comment je peux envisager un avenir professionnel et personnel alors que l’urgence climatique nous rattrape ?

De nombreux reportages sur Radio France et France TV lui offrent des ressources pour inviter les débats publiques dans la classe.

Enfin notons que le projet « Les arbres et nous » a pu voir le jour grâce aux contacts que Claire développe dans sa mission d’animation des territoires. Ayant eu vent de l’existence d’un collectif d’artistes et connaissant la façon de travailler de sa collègue, Claire a passé l’information qui a été transformée en projet puis en résultats.

Enseigner les matières générales en situation

L’arbre est un objet sympathique qui inspire et qui est en cela un point d’appui interdisciplinaire. Isabelle a l’habitude et veut enseigner à partir de faits d’actualité qu’elle met au travail en classe. Ramener l’actualité en classe, ramener une situation en classe, inclure des tiers sont ordinaires pour elle. Ces situations sont instructives et permettent aux jeunes de comprendre le monde et de penser.

Le projet a été déterminant pour revaloriser l’image que les jeunes avaient d’eux-mêmes et aussi celle qu’ils avaient donnée dans le lycée jusque-là. L’intervention des artistes est arrivée à un moment compliqué pour la classe : les tensions entre les élèves montaient, beaucoup de cours devenaient difficiles car les situations de handicap (troubles de l’attention, agressivité) prenaient le dessus (peut-être avec la montée, côté des professeurs des exigences, de l’arrivée des bacs blancs, les rendus de stage territoire…). Diviser la classe en 3 ateliers a donné des espace-temps de respiration aux élèves qui subissaient cette montée des tensions. Que chaque groupe rende un travail abouti et qu’ils le mutualisent ont valorisé leur image. Ils ont aussi reçu les félicitations des artistes, des professeurs et de la direction. Leur rapport à l’école a changé, ils ont pris confiance en eux et vécu que l’école pouvait leur faire faire des choses divertissantes et formatrices en même temps.

« Je me suis dépassée » a dit une élève lors de l’atelier d’écriture, « Je ne pensais pas y arriver » pour un élève du groupe théâtre, « vous avez vu comment je me suis investie ?! C’était bien » a rapporté une autre élève lors de la prise d’image et de son.

Si les élèves y ont trouvé motivation à apprendre, de leurs côtés, Claire et Isabelle sont agréablement surprises par la qualité des résultats. Elles ont bien senti que « l’activité fonctionnait » mais ne s’attendaient pas à un tel sérieux dans la relation avec les artistes et à une telle capacité d’écriture des élèves, une telle qualité du théâtre (dont des élèves timides). Pour les élèves qui ont choisi l’atelier vidéo, s’il s’agit des élèves les moins scolaires, ceux qui ont des troubles de l’attention, qui ont du mal à rester en place, ils se sont très bien investis et ont posé des questions pertinentes à leurs interlocuteurs.

Les collègues, le public extérieur qui ont assisté aux ateliers de l’après-midi ont été sensibles en effet à la qualité des travaux et à l’ambiance qui a circulé entre les participants.

Pour Isabelle, travailler ainsi donne sens aux apprentissages car cela ancre, dans le réel et le vécu, les notions qu’elle cherche à travailler (ici poésie, nature, expression de l’intime, engagement de l’artiste). C’est aussi pour elle une façon de mettre les élèves en action, de contourner leurs problèmes de concentration, de les engager sur une production. Elle se pose souvent la question « que font les élèves ? » quand elle réfléchit à ses cours et avec un tel projet, elle a sa réponse. En travaillant comme cela, elle peut ne pas déroger à une certaine exigence de contenu et de niveau alors que le profil des élèves ne favorise pas cette exigence, aussi bien en ce qui concerne la culture générale que l’expression écrite et orale. Enfin, faire intervenir des tiers est aussi une façon, certes de ramener des contenus, mais aussi une façon de décentrer les apprentissages de la simple et seule relation prof-élèves.

Opportunités des formations et des appels à projet qui peuvent initier des actions

Ici, Isabelle mobilise tous les ans des appels à projets pour faire rentrer dans la classe des questions sociétales et challenger ses élèves. Elle trouve que c’est motivant pour elle et pour les élèves, au début de l’activité quand il s’agit de se lancer et à la fin quand il s’agit de restituer et éventuellement gagner le challenge. Les appels à projets peuvent donner des idées pour initier des actions dans les établissements. AuRA est une région dynamique en matière d’appel à projets et le SRFD AURA est aussi dynamique sur cette question permettant à ses établissements scolaires de postuler et de s’engager (appel à projet sur l’alimentation, appel à projet sur les bonnes pratiques agricoles et les Gaz à effet de serre, Les Entretiens Olivier de Serres sur le travail en agriculture, l’opération On Peut Mieux Faire pour stimuler l’engagement éco-responsable dans les établissements). Ils sont autant de leviers pour créer un cadre où entreprendre des apprentissages avec les jeunes.

Dans le processus de travail, les enseignantes sont en veille et se forment. Les formations sont des ressources de première importance. Ici par exemple, la formation proposée par l’Institut Agro Florac sur la thématique « Comment les arts peuvent être un levier pédagogique pour se relier au vivant ? » était attractive et appropriée au projet. En décembre 2024, L’Institut Agro Florac propose une formation sur le théâtre documentaire au service des transitions. La Bergerie Nationale propose des formations sur le paysage, les sols, l’élevage dans une démarche d’une seule santé (One Health). Dans le cadre de dispositifs institutionnels (Projet de développement, Biodiv’Expé, etc.) animés par le DNA (Dispositif National d’Appui) des formations pédagogiques et didactiques accompagnent au changement. Les formations FORMCO correspondent bien aux attentes disciplinaires, même si, à l’instar des formations régionales, il y en a de plus en plus axées sur la vie scolaire et éducative. Pour être autant informée, Isabelle s’est inscrite sur les listes de diffusion des structures formatrices. D’autres structures que celles du ministère de l’agriculture proposent aussi des formations, parfois sur les vacances scolaires ; elles offrent la double dimension scientifique (mise à jour des connaissances universitaires aussi bien en histoire qu’en littérature) et pédagogique (propositions d’ateliers, échanges de pratiques avec des collègues).

L’EPL de Cibeins sait accompagner le départ en stage de ses enseignants en accordant de la souplesse pour les absences et les rattrapages de cours.

Un Printemps des Transitions pensé comme une vitrine de ce qui est identifiant de l’EPL

Isabelle et Claire partaient une nouvelle fois sur une journée de l’arbre. Elles n’ont pas pensé « Printemps des transitions ». De son côté, l’EPL était attendu cette année-là pour organiser un Printemps des transitions car 1- c’est une demande de la DGER (action 4.2 de EPA2) et 2- l’EPL est plutôt bien engagé dans les agro-écologique (conversion de l’exploitation à l’AB, reconception du restaurant scolaire et des espaces paysagers, reconquête de l’ancrage territorial…) et éducative (enseigner à partir de situations à potentiel problématique, formations des enseignants…). Pour la référente EPA2, il lui semblait important de valoriser ce qui se fait déjà et qui est identifiant de l’EPL.

La journée de l’arbre, organisée le matin autour de la préparation des artistes avec les élèves pour les prestations de l’après-midi, installation de la scénographie, ouvrait ses portes l’après-midi aux personnels, partenaires du projet de développement de Claire et familles. Rendre visible par un public extérieur, la TAE (ici éducative – apprentissages – adossée à une transition agro-écologique – le projet

de développement de Claire) mise en œuvre dans l’EPL répondait au cahier des charges du « Printemps des transitions ». Ni une ni deux, l’après-midi de la journée de l’arbre est devenue le « Printemps des transitions ». La convergence était évidente.

Positionner l’évènement trop tôt dans l’après-midi (13h30 pour l’atelier écriture et 16h30 pour le spectacle) ne facilite pas la présence de beaucoup d’extérieurs. Beaucoup ont excusé leur absence en raison de cela. Positionner l’ouverture au public en début de soirée (18h30) serait-il plus attractif ? Le coupler avec une conférence technique, comme cela s’est passé 2 ans auparavant, attirerait-il davantage de professionnels (agriculteurs et techniciens) ? Nous savons combien cette question est récurrente dans nos établissements.

Place de la référente EPA2 locale

Les collègues sont parfaitement autonomes et la question des transitions est bien acculturée au sein de l’établissement auprès d’un gros noyau de collègues. La référente EPA2 a juste été là pour connecter une activité en cours qui était à ses yeux édifiante d’un point de vue pédagogique et identifiante de l’EPL, à une attente nationale. Elle est aussi là maintenant pour retracer l’évènement dans cette fiche.

Anticipation et cadrage

L’anticipation est de mise. Le projet a été écrit en mai et il a été placé (même sans avoir le retour de la région sur l’octroi de la subvention) dans le planning de PLURI de l’année suivante lors de la réunion de filière.

On voit ici que quand les enseignants sont au clair dans leur tête sur leur cible d’apprentissage et sur comment y arriver (organisation, consignes, outils à disposition). Cela apporte de l’efficacité du côté des enseignantes et de la confiance-motivation du côté des jeunes. Du côté des partenaires quand il y en a, comme c’est le cas ici, cela rassure ; notamment les artistes ont apprécié le sérieux de l’organisation et notamment de la préparation des élèves en amont. En discutant avec eux, ils disent qu’ils ne veulent pas se substituer aux enseignants, faire cours à leur place et qu’ils ont besoin de voir que leur intervention est attendue et ait du sens pour les élèves.

Une des raisons de la réussite de ce projet est que les choses étaient construites.

Pour conclure, retenons de cette belle expérience pédagogique :

  • L’anticipation ;
  • Y aller pas-à-pas, prendre le temps de construire la confiance et le dialogue des disciplines ;
  • Le processus de veille et de formation personnelles et collectives des deux enseignantes ;
  • Être au clair sur ce qu’il s’agit de faire apprendre et comment s’y prendre ;

Le grand intérêt de travailler à partir d’un objet pédagogique territorialisé porteur de sens à la fois pour les élèves, les enseignants et les acteurs du territoire ; cela facilite grandement les apprentissages.

FICHIERS A TELECHARGER

Descriptif : Textes d’élèves issus de l’atelier d’écriture
annexe-textes-deleves-issus-de-latelier-decriture.pdf

VIDEOS

 
Date :27 mai 2024
Mots-clés : Agroécologie, Pédagogie de projet, Pluridisciplinarité (multi)

Voie de formation : Formation initiale
Niveau de formation : IV (Bac pro, Bac général)
Initiative du dispositif : Nationale
Structure d’appui : Etablissement National d’Appui
Référent : Brigitte BESSON ,brigitte.besson@educagri.fr

Etat de l’action : Terminée
Nature de l’action : Innovation
Etablissement National d’Appui : Bergerie Nationale

 

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