L’innovation pédagogique
Comment comprendre cette notion d’innovation pédagogique ? Voici quelques éléments de réponse.
L’innovation pédagogique considérée dans Pollen :
Pollen est le site de partage des innovations et des expérimentations pédagogique de l’enseignement agricole.
Une innovation pédagogique, au sens de Pollen, est :
- Un processus de changement
- Mené dans et par un établissement
- De façon collective, structurée, à l’initiative d’une ou plusieurs personnes,
- De façon parfois individuelle, mais en lien avec d’autres personnes de l’établissement,
- En cours ou achevé,
- Au service de l’apprenant,
- Centrée directement sur l’apprenant ou sur une organisation pédagogique de la communauté éducative,
- Qui a un impact sur les activités d’apprentissage de l’apprenant,
- Qui respecte les orientations politiques de l’enseignement agricole,
- Qui peut, après autorisation académique, avoir le statut d’ expérimentation pédagogique.
A l’inverse, ne serait pas une innovation pédagogique susceptible d’être valorisée dans Pollen :
- Un projet de centre, de structure…
- Une action contraire aux orientations des politiques publiques
Des définitions de l’innovation pédagogique
Le ministère de l’Education Nationale a mis en place en avril 2013 le Conseil national de l’innovation pour la réussite éducative (Cnire). Celui-ci propose une définition de l’innovation pédagogique.
« Une pratique innovante est ainsi une action pédagogique caractérisée par l’attention soutenue portée aux élèves, au développement de leur bien-être, et à la qualité des apprentissages. En cela, elle promeut et porte les valeurs de la démocratisation scolaire. Prenant appui sur la créativité des personnels et de tous les élèves, une pratique innovante repose également sur une méthodologie de conduite du changement. Enfin, le partenariat permet à l’équipe d’enrichir son action grâce aux ressources de son environnement. Chacun de ces points ne suffit pas à lui seul, mais plusieurs combinés font d’une action une pratique innovante dans sa conduite et dans ses effets ».
Source : Rapport du Cniré PDF
Si l’on regarde du côté de nos amis canadiens, le Conseil Supérieur de l’Education du Québec définit l’innovation en éducation.
« L’innovation en éducation est un processus délibéré de transformation des pratiques par l’introduction d’une nouveauté curriculaire, pédagogique ou organisationnelle qui fait l’objet d’une dissémination et qui vise l’amélioration durable de la réussite éducative des élèves ou des étudiants ». Source : rire.ctreq.qc.ca
Françoise CROS, professeur émérite au CNAM, membre du comité national d’expertise de l’innovation pédagogique dans l’enseignement agricole, définit l’innovation pédagogique comme un processus qui a pour intention l’introduction d’un nouveau ou d’un nouveau relatif dans un système existant en vue d’une amélioration et dans une perspective de diffusion.
Appliquée à l’innovation pédagogique, cette définition peut renvoyer aux changements dans les situations pédagogiques et les apprentissages avec comme intention de les faire évoluer. Une idée de progrès s’attache à l’innovation. Cinq attributs peuvent être attachés à l’innovation : le « nouveau », le « produit », le « changement », l’action finalisée, supposant intention et planification et le processus avec une démarche de résolution de problème.
Quelques mots clés.
La notion d’innovation pédagogique peut être abordée à travers quelques termes proches. Voici quelques mots clés abordés de façon très synthétique.
Nouveauté : l’innovation ne consiste pas à inventer, au sens de réaliser une création originale, qui n’existait pas auparavant. L’innovation est davantage l’importation, l’emprunt d’objets nouveaux dans un contexte donné. En cela l’innovation est l’assimilation d’un objet nouveau par les membres d’un système.
Problème : L’innovation vise à résoudre un problème. Elle est finalisée. Elle vise à améliorer l’existant. L’innovation pédagogique est centrée sur la réussite de l’apprenant.
Changement : L’innovation est souvent portée par une personne ou un groupe, considérés au début comme transgressifs, déviants… L’innovation demande une part de créativité et d’originalité. Pour innover, l’organisation doit laisser se développer cette volonté de redéfinir les problèmes et de créer de nouvelles méthodes pour les résoudre. Ce processus de changement est au cœur de l’innovation.
Émergente ou pilotée : L’innovation peut être pilotée par une institution, comme par exemple lors de la rénovation d’un diplôme. L’innovation peut être émergente, c’est-à-dire issue du niveau local.
Institution : L’innovation locale, « ordinaire » au sens de Norbert Alter, est un processus de changement porté par des individus animés par une conception différente de ce qu’il faudrait faire, de ce qui serait « bien ». En cela l’innovation porte une part de conflit avec l’organisation traditionnelle. Une innovation réussie est de ce fait une innovation instituée, qui est au bout d’un certain temps complètement intégrée à l’organisation. Cette appropriation est un signe de la durabilité de l’innovation.
Numérique : L’association entre innovation pédagogique et numérique est fréquente. Si l’usage du numérique par l’école est incontournable, l’innovation pédagogique, en tant que processus de changement, finalisé et durable, dépasse le seul champ des nouvelles technologies.
Pour aller plus loin :
Interview de Norbert Alter. Sociologie de l’innovation.
Norbert Alter revient sur les résultats de ses recherches présentés dans « L’innovation ordinaire ». Pour ce sociologue des organisations, l’action innovatrice est le résultat d’un groupe d’individus disposant d’un projet indépendant de celui des institutions qui les abritent. Cette « déviance » cherche à résoudre un problème, par des actions efficaces, dans un contexte d’incertitude et pour arriver à des fins considérées comme justes. Ces processus d’innovation sont indispensables aux régulations du travail mais génèrent des tensions entre la logique de l’innovation et celle de l’organisation.
Les pratiques innovantes en éducation. Marie-Ève Lacroix et Pierre Potvin, Université du Québec à Trois-Rivières.
Ce texte présente les éléments théoriques entourant la notion de pratique innovante. Il aborde la notion de pratique, puis celle d’innovation. Suivent les caractéristiques de l’innovation, ses divers types et les étapes de son processus. En dernier lieu est abordée la question des pratiques exemplaires en lien avec les pratiques innovantes.
« On demande toujours des inventeurs et l’on cherche encore les innovateurs ». Article de Jean François Cerisier dans la revue Distances et médiations des savoirs.
Cet article discute les notions d’invention et d’innovation dans le sillage des travaux de Geneviève Jacquinot-Delaunay et de la communauté scientifique à l’animation de laquelle elle contribue fortement dans une perspective interdisciplinaire. Il convoque le modèle de l’instrumentation numérique de l’activité et ses deux dimensions subséquentes de la médiation et de la genèse instrumentales pour appréhender les processus d’invention et d’innovation. Enfin, il propose le modèle de zone proximale de développement de l’instrumentation qu’il confronte sommairement à la réalité de la politique actuelle de déploiement massif de tablettes tactiles dans l’enseignement scolaire.
« La cohérence pédagogique ne peut être décrétée, elle doit s’élaborer sur la durée »
Texte de l’entretien accordé par Philippe Meirieu au journal « Le Monde » dans le cadre du dossier paru dans le numéro du vendredi 28 août 2015 : « L’innovation, c’est classe ».