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Comment favoriser un débat constructif entre élèves sur la question controversée du loup ?
Lycée agricole des Hautes Alpes, Provence-Alpes-Côte-d’Azur
127, rue de Valserres
05000 GAP
Tél : 04925 0436
Site web : http://gap.educagri.fr/
Responsable : Bertrand Lequette ,
DESCRIPTION SYNTHETIQUE DE L’ACTION
Du conflit territorial au conflit d’élèves
Les nouvelles orientations politiques du Ministère de l’Agriculture promeuvent l’agro-écologie et invitent les établissements d’enseignement agricole à développer des innovations dans le champ de « l’éduquer à produire autrement ». Le dialogue qu’elles proposent entre la protection de l’environnement et les enjeux liés à la production est parfois à la source de tensions et de conflits entre les acteurs concernés. Les dégâts générés par le loup dans les systèmes pastoraux des Hautes-Alpes ont ainsi donné lieu à des débats houleux et des manifestations parfois violentes sur le territoire du lycée agricole. Ces débats ont diffusé dans l’établissement conduisant parfois les élèves à des prises de position marquées soit en faveur, soit contre le loup, sans qu’un véritable dialogue soit initié.
Favoriser un débat constructif dans le souci d’un vivre ensemble
Au travers de l’action proposée, il s’agissait d’apprendre aux élèves à dialoguer de manière constructive sur ces questions controversées, de prendre une posture empathique et respectueuse à l’égard d’autres opinions, et de développer un esprit critique en s’ouvrant à la complexité de problématiques agro-écologiques. En d’autres termes, il s’agissait de favoriser chez de futurs professionnels des attitudes propices à s’inscrire dans un dialogue territorial.
Un projet mis en œuvre dans un climat de suspicion
Les tensions sur le territoire et dans l’établissement associées à la présence du loup dans les Hautes Alpes ont conduit l’administration régionale et certains membres de l’équipe éducative du lycée à douter de l’opportunité de susciter un tel débat entre les élèves. Non seulement, celui-ci risquait d’attiser les haines et de réactiver des souffrances, mais il était aussi susceptible de mécontenter les acteurs du territoire et certains parents d’élève. Une équipe réduite d’enseignants restait convaincue de l’intérêt éducatif de la démarche. Ils ont pu concrétiser leur projet grâce à l’appui de la direction et à l’accompagnement d’une animatrice en agro-écologie.
Un débat qui s’est déroulé dans un climat de bienveillance
Deux classes qui risquaient de présenter des positionnements différents, voire opposés sur la question de la réapparition du loup dans les Hautes Alpes, ont été réunies. Afin de permettre aux élèves de dialoguer de manière constructive, l’équipe s’est appuyée tout à la fois sur les fondements de la didactique des questions socialement vives (questions qui font l’objet de vifs débats dans le monde scientifique, dans la société et dont les élèves sont généralement informés) et sur une approche d’apprentissage coopératif, la méthode dite CLIM (Cooperative Learning In Multiculturality).
L’approche choisie se fonde sur les principes suivants :
– permettre aux élèves de traduire individuellement leurs conceptions relatives à la présence du loup dans les Hautes Alpes
– susciter des échanges et des travaux en petits groupes hétérogènes en termes d’opinions
– donner un rôle à chaque membre du groupe de façon à permettre au groupe de fonctionner de manière autonome et coopérative
– faire découvrir les controverses scientifiques sur la question du loup en toute impartialité
– décadrer les points de vue des élèves en les conduisant à réfléchir sur un contexte loup-pastoralisme différent du contexte alpin.
– s’inscrire dans la résolution de problèmes complexes pour lesquels il n’existe pas de solutions uniques.
Une innovation qui suppose l’acquisition de nouvelles compétences
L’équipe projet s’est fondée sur une approche favorisant l’apprentissage entre pairs en générant un dialogue sur une questions controversée. Les élèves ont été ainsi amenés à développer une argumentation étayée par des savoirs scientifiques, même controversés. En canalisant les rapports tensionnels dans un cadre précis de communication, ils ont pu tout à la fois développer une affirmation d’une différence au sein d’un groupe divisé, une intégration sociale et la reconnaissance de l’autre. S’inscrivant dans l’expression d’une affirmation de soi et dans une démarche de coopération, ils ont appris à développer un mode de communication favorable au respect de chacun.
A l’issue de la journée banalisée pour ces échanges, certains élèves parmi les plus virulents, avaient changé de posture et pouvaient parler sereinement de la question du loup.
De manière plus imprévu, des élèves plutôt en faveur du loup ont changé d’avis, témoignant d’une posture empathique en faveur des filles et fils d’éleveurs.
Les élèves souhaitent désormais organiser des rencontres avec des éthologistes mais aussi des membres d’association de protection de la nature pour se confronter à d’autres regards. Des enseignants ont pu observer des changements d’attitudes et de comportements d’élèves et considèrent avec intérêt l’approche pédagogique utilisée. Ils s’interrogent cependant sur les compétences nouvelles qu’elle suppose pour son animation.
Il s’agissait au départ de résoudre les tensions entre élèves générées par des questions vives. Désormais, le problème est pour l’enseignant d’acquérir les compétences qu’une telle démarche pédagogique suppose, où l’enseignant n’est finalement plus au cœur du savoir mais s’inscrit dans une posture impartiale pour favoriser une pensée critique.
VIDEOS
Mots-clés : Agroécologie, Pédagogie de groupe, de pairs, Pluridisciplinarité (multi)
Voie de formation : Formation initiale
Niveau de formation : IV (Bac pro, Bac général)
Initiative du dispositif : Locale
Structure d’appui : Etablissement National d’Appui
Etat de l’action : En cours, Terminée
Nature de l’action : Innovation
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