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Nos déchets, les ressources de demain
Lycée agricole de Bréhoulou Quimper Fouesnant, Bretagne
3 chemin de Kernoac’h
29170 Fouesnant
Tél : 0298560004
Site web : https://www.brehoulou.eu
Responsable : Hugo Leroux, Directeur , legta.quimper@educagri.fr
Rédacteur de la fiche : Dominique Geffroy-Sourd enseignante de biologie-écologie, Sylvie Malgorn enseignante en espagnol, Armelle chargé de missions nationales d’appui pédagogique à l’enseignement agricole, Enseignantes
, sylvie.malgorn@educagri.fr
DESCRIPTION SYNTHETIQUE DE L’ACTION
Un projet ERASMUS pour développer des apprentissages attendus dans le référentiel à partir d’un sujet de société : la gestion des déchets
Erasmus est un programme européen qui encourage la mobilité des étudiants, du personnel éducatif, des stagiaires, des apprentis, des professionnels de la jeunesse et des jeunes.
L’origine du projet
Ce projet Erasmus avec un lycée italien concerne les élèves de 1ère générale et les écoresponsables de terminale STAV et terminale générale. Il est la résultante de 2 idées fortes :
1- D’abord nous, enseignantes en biologie écologie et en espagnol, souhaitions engager les élèves en les mobilisant autour d’un projet d’une question de « société » en lien avec les programmes de première G spécialité « biologie-écologie ».
Même si la thématique des déchets n’est pas nouvelle, ce sujet nous apparaissait fédérateur car tous les élèves y sont confrontés. Ce sujet soulève un certain nombre de problématiques environnementales et questionne notre rapport au monde et à notre consommation. A quels problèmes les solutions que nous avons mises en place répondent-elles ? Comment d’autres pays s’y prennent-ils ?
Nos élèves sont « nés » avec des pratiques de tri mais ont peu conscience de l’ampleur de la problématique des déchets et des enjeux écologiques auxquels la société doit faire face. Ce sujet permet aussi d’aborder la notion d’économie circulaire : nous sommes actuellement confrontés à un problème de ressources sur la planète, les déchets peuvent être une partie de la solution, bien triés ils peuvent devenir des ressources. Ainsi, partir d’un sujet à la fois familier et inconnu, nous est apparu être une bonne accroche pour les surprendre et les intéresser.
2- Un deuxième facteur a été aussi déterminant dans le choix d’Erasmus. Historiquement et jusqu’en 2019, les élèves de filière générale du lycée agricole de Bréhoulou réalisaient au cours de leur cursus, un voyage scolaire. Ces « voyages » étaient des occasions pour s’ouvrir à d’autres cultures, d’autres environnements, d’autres problématiques. La pandémie Covid 19 a remis en question ces voyages et aujourd’hui seuls les stages professionnels à l’étranger sont maintenus via les mobilités individuelles ERASMUS. Les filières générales n’avaient à ce jour plus d’occasions de séjours à l’étranger.
Nous avons donc monté un projet qui s’inscrit pleinement dans le référentiel de formation du baccalauréat général et qui contribue à amener les jeunes à questionner notre rapport aux déchets, la gestion mise en place en vue de comparer nos pratiques avec celles développées dans un pays étranger l’Italie, d’intégrer la notion d’économie circulaire. Il s’inscrit plus précisément dans le programme de première du baccalauréat général.
Au regard du sujet travaillé et des possibilités financières, nous avons aussi proposé aux écoresponsables de terminale STAV et de terminale générale de participer à la démarche et à la mobilité en Italie. Nos élèves sont partis en avril 2024 à Brindisi en Italie à la rencontre d’autres lycéens.
Les intentions pédagogiques
Ce projet Erasmus offre un cadre et une opportunité pour travailler les apprentissages et motiver les apprenants. Il contribue ainsi à :
- appréhender des concepts scientifiques en écologie et en biologie « Si nous continuons d’exploiter les ressources disponibles au même rythme, d’ici 2050, nous aurons besoin de trois planètes Terre pour satisfaire notre demande. Le stock de ressources limité et les enjeux climatiques nous poussent à transiter d’une économie « extraire-fabriquer-jeter » à une économie circulaire, neutre en carbone, durable sur le plan écologique et non toxique ». https://www.europarl.europa.eu/news/fr/headlines/society/20210128STO96607/comment-parvenir-a-une-economie-circulaire-d-ici-2050,
- s’appuyer sur une action concrète de terrain pour amener les apprenants à développer un raisonnement global sur un problème écologique » qui est un attendu de la spécialité « biologie-écologie » du référentiel de formation du baccalauréat général,
- comparer des pratiques avec celles mises en place dans un autre pays européen l’Italie,
- encourager l’apprentissage d’une langue étrangère et développer les compétences linguistiques (l’espagnol est la langue commune enseignée dans les 2 établissements).
La rencontre avec d’autres lycéens, étrangers est une opportunité pour se décentrer et prendre conscience que la problématique étudiée nous concerne tous. Elle sera une occasion pour engager la discussion entre les jeunes autour de la question des déchets et des pratiques réciproques, de réfléchir ensemble aux enjeux, de mener des actions collectives de ramassage des déchets pour se rendre compte que nous sommes confrontés aux mêmes problèmes.
L’ensemble de la démarche est pensé pour « embarquer » les apprenants dans la construction d’une « démarche de raisonnement global en écologie – biologie », et pour « travailler un argumentaire » et est organisé autour de 2 grands axes « comprendre » et « s’engager ». Ces apprentissages sont des attendus du référentiel et seront évalués lors du grand oral et de la Spécialité Biologie écologie des filières générales. Les élèves sont non seulement amenés à analyser et à travailler l’impact, la valorisation, les pistes de solution pour mieux « gérer » les déchets mais aussi à formaliser leur démarche de raisonnement et d’argumentation.
Pour l’enseignante en espagnol, l’enjeu ERASMUS est important pour enrôler les élèves dans l’apprentissage de la langue. La thématique et la mobilité sont des « cadres motivants » pour encourager l’expression écrite et orale.
Ainsi, cette mobilité contribuera à développer une pensée critique et aussi s’ouvrir à d’autres cultures. C’est aussi une occasion pour renforcer la cohésion de groupe.
La chronologie de l’action, le rôle des acteurs du projet et leurs fonctions
C’est l’enseignante d’espagnol Sylvie Malgorn qui est à l’initiative du projet. Sylvie, a été impliquée dans la coopération internationale au sein du Breci pendant plusieurs années, c’est elle qui s’est chargée des différents contacts pour monter le projet, tout particulièrement avec des homologues italiennes pour développer le partenariat. Le contenu du projet a été rédigé par les 2 enseignantes impliquées, Sylvie Malgorn et Dominique Geffroy-Sourd enseignante de biologie-écologie, avec une place importante apportée aux enseignements de biologie -écologie. Ce projet a ensuite été soumis à la direction, déposé en février 2023 puis retenu en juin.
Dès la rentrée scolaire de septembre, il a été proposé aux élèves de première générale et aux éco-responsables de terminale STAV et de Terminale générale.
Un COPIL a été mis en place avec des personnels de l’établissement dont la direction. L’implication de la direction est importante et nécessaire 1) pour accompagner la démarche et la logistique liée au déplacement en Italie et faire valider des choix et 2) pour soutenir et faire connaître le travail conduit par les apprenants. Ce soutien est important pour les élèves, pour les encourager dans leurs initiatives : la mobilisation des personnels de l’établissement– restauration, service – des initiatives sur la gestion des déchets, la mise en place d’action de sensibilisation au sein du lycée sur le sujet et auprès d’une école primaire, la mise en dialogue autour de la filière mégots, plantation d’arbres pour compenser l’empreinte carbone lié au voyage…Les services de la vie scolaire et Marianne Hérin, CPE sont également partie prenante du projet.
Par ailleurs, le lycée de Bréhoulou est porteur d’un projet « Préparons ensemble la Transition Agri-Aqua-écologique sur le littoral – PETAAL » jusqu’en 2024. Des passerelles sont en cours entre ces 2 projets notamment autour de la valorisation des déchets de cuisine.
Et aujourd’hui, ces différentes actions fédèrent plus largement au sein de la filière générale avec la mobilisation des enseignants en mathématique et en physique.
Démarche proposée : Apprendre à raisonner en questionnant les solutions ?
Nous avons organisé ce projet selon une progression pédagogique qui s’appuie sur des séances de 2h à 4h par mois. Il se déroule en 2 grandes étapes : comprendre pour agir et apprendre à raisonner des solutions.
1- Une première étape : « Comprendre pour agir »
Au tout départ, nous avons d’abord recueilli les représentations des apprenants pour repérer l’état des connaissances et de compréhension de la filière déchet. Un deuxième « recueil » sera proposé en fin de projet pour évaluer l’impact du travail de l’année sur leur compréhension du problème et du raisonnement mobilisé.
Ainsi, dans le cadre de cette première étape nous avons proposé une progression qui vise à problématiser la question du tri des déchets. Les apprenants ont été amenés à réaliser un diagnostic/état des lieux au sein de l’établissement, à comprendre la chaîne du tri et l’impact de la production de déchets sur notre environnement et notre santé. Cette étape se décompose autour de 4 séances.
– Une première séance qui a d’abord été dédiée à comprendre et analyser nos comportements et les réponses apportées en matière de tri sur l’établissement. Nous avons ainsi proposé à nos élèves de jouer aux « rudologues » et à expérimenter la posture d’enquête et de diagnostic. Ils ont ainsi collecté, exploré et analysé le contenu des poubelles issues de lieux différents sur l’établissement avec le soutien d’une agente de service de l’établissement, Agnès Plémevaux, impliquée dans le projet.
– Une deuxième séance a plongé les élèves dans une visite du centre de tri du pays fouesnantais pour repérer les filières de valorisation dans lesquelles les déchets peuvent s’inscrire, la manière dont ils sont triés, l’organisation de ces filières et les attendus en matière de valorisations possibles.
– La 3eme séance est un moment d’apport de connaissances scientifiques, sous forme ludique éclairant la problématique des déchets. Nous nous sommes appuyés sur les ressources pédagogiques proposées par la fondation Tara Océan, autour de la fresque de la pollution plastique. Il s’agit d’une animation qui invite par groupe de 5 à reconstruire le cycle de vie des déchets plastiques. Les élèves sont ainsi questionnés sur l’origine et la nature de nos déchets. Cette animation met en exergue l’impact de ces pollutions sur les océans et sur la santé humaine. Ce travail a été doublé du visionnage d’un film.
– La 4ème séance est la visite d’une usine MéGO spécialisée dans la récupération des mégots de cigarettes et leur recyclage en mobilier urbain. Cette visite met en évidence qu’une collecte appropriée des déchets peut les mettre en position de ressource et que des solutions existent.
Forts de ces enseignements, nos élèves ont observé lors d’un TP, le sable provenant de 3 plages fouesnantaises pour relever les formes de pollutions présentes dans nos océans et réaliser que cette pollution fait partie de notre quotidien.
2- Une deuxième étape : Apprendre à raisonner des solutions : quelles actions conduire au sein de l’établissement pour réduire et mieux valoriser nos déchets et contribuer à l’économie circulaire ? (en cours…)
Cette étape a démarré en janvier 2024 et elle va permettre aux jeunes de prendre des initiatives et de proposer des actions ou des solutions à partir du diagnostic réalisé en étape 1.
Différentes propositions sont en cours ou programmées et se mettent en œuvre au fur et à mesure des séances.
1- Des actions de sensibilisation :
– Au sein du lycée, par la mise en scène d’une balle de bouteilles plastique compressées prêtées par le centre d’écotri visité précédemment et dont la masse représente approximativement la masse de déchets produite par un français sur une année.
– Les élèves, par groupe, vont préparer une intervention de sensibilisation au tri des déchets à destination de deux catégories de public : une classe de seconde du lycée de Bréhoulou et une classe de CM2 de l’école primaire de Kérourgué à Fouesnant.
Ces interventions sont des opportunités pour travailler l’argumentation et choisir son argumentaire en fonction du public cible, et s’entraîner au débat.
2- Une action d’amélioration du tri au sein du lycée de Bréhoulou.
En effet, suite au diagnostic réalisé en début de projet, le constat a été fait qu’il y avait des pistes d’amélioration du tri au sein du lycée. Après avoir mené une réflexion à ce sujet, les élèves vont faire des propositions à l‘équipe de direction de l’établissement pour rendre plus efficient le tri (exemples : tri du matériel scolaire, récupération des mégots en zone fumeur, récupération des déchets organiques issus du goûter des élèves….).
Cette deuxième étape a aussi été le moment clé de la préparation à la mobilité en Italie. Cette mobilité a été préparée avec les élèves afin de lever toute appréhension possible : le contact avec les correspondants italiens a été organisé pour une meilleure intégration et cohésion du groupe, avec la sélection d’animations (jeux brise-glace) et de rencontre sportive. Une lecture commentée collective du programme de la semaine a été faite.
Enfin, ce projet se prolongera jusqu’au premier trimestre de terminale pour revenir sur l’expérience italienne. Ce sera l’occasion de comparer les stratégies et les modalités de prise en charge des déchets des 2 pays, d’en formaliser les enseignements en matière de tri des déchets. Un temps de réflexion sera posé pour reconstruire la démarche raisonnement global.
Le résultat
Les pratiques nouvelles
Le sujet traité n’est peut-être pas innovant mais il pose cependant l’enjeu de l’économie circulaire et invite à changer le regard sur les déchets, à ne plus les voir uniquement comme des rebuts mais potentiellement comme une ressource possible, en pensant ré-usage.
La démarche proposée, elle, invite les apprenants à questionner des pratiques ancrées dans le quotidien, à chercher et à comprendre. Il s’agit d’une étape nécessaire pour initier une pensée critique. Le travail que nous avons conduit les prépare à une démarche de raisonnement : on part d’un problème, d’une question, puis on explore la question en élargissant le périmètre pour identifier ce qu’il recouvre. On se met dans une démarche de recherche et d’enquête en élargissant le problème initial (on passe du tri à plus largement des réflexions autour de la production des déchets, des impacts, du recyclage), en analysant les solutions en vue d’en proposer de nouvelles. Ce qui est aussi « innovant » pour nous, c’est que dans les filières générales, on est assez peu amené à enseigner à partir de projets. On enseigne au plus proche du référentiel de formation dans l’objectif de préparer les attendus du baccalauréat via la mise en œuvre de nos cours, parfois à partir de cas concrets. Là, notre objectif est de s’appuyer sur ce projet pour enseigner des notions de biologie /écologie et l’espagnol mais aussi pour approcher et formaliser la démarche de raisonnement. Une partie des attendus s’inscrit dans un processus d’apprentissage et ne sera sans doute visible qu’en fin de cursus, mais un certain nombre d’enseignements se fait au fur et à mesure des séances. Ce projet rend curieux les apprenants et est un support engageant les échanges, le débat et les réflexions. C’est une préparation à « penser ». Apprendre à construire un raisonnement et un argumentaire étayé est un enjeu du référentiel et un attendu du grand Oral. C’est par ailleurs un enseignement clé des politiques publiques du plan EPA 2.
La mobilisation et l’investissement de nos apprenants dans leurs apprentissages et dans le projet est aussi un résultat important. La motivation, l’ancrage du sujet dans des réalités environnementales…les engagent dans la réflexion, dans des propositions, dans des prises de décisions et dans les apprentissages. Ce projet encourage les jeunes à travailler ensemble à partager des idées et en débattre, et aussi à collaborer. Ce qui est aussi un enjeu d’apprentissage important et une condition pour former des citoyens acteurs.
Nous avons partagé ces réflexions et ces pratiques avec les élèves Italiens lors de notre séjour à Brindisi et un travail « réflexif » sera proposé pour analyser des visions des déchets différentes et donc des pratiques de gestion différente. Nous avons aussi profité de cette mobilité pour découvrir les lieux, paysages, une autre culture et échanger en espagnol, langue de communication commune aux apprenants.
Par ailleurs, et pour terminer, lors du montage du projet, nous avions envisagé de voyager en train pour limiter notre empreinte carbone et sensibiliser les apprenants à l’impact du transport sur le climat. Cette option étant trop coûteuse et trop longue, le voyage en car n’étant pas possible non plus à cette période, nous n’avions d’autres choix que le voyage avion. Nous réfléchissons avec les apprenants à compenser notre empreinte carbone, en calculant et en nous interrogeant sur des mesures et solutions possibles. Une des pistes envisagées à ce jour est la plantation d’environ 300 arbres sur l’exploitation du lycée. Cette proposition doit encore être actée en interne.
Auteures :
Dominique Geoffroy Sourd, enseignante en Biologie-Ecologie, Lycée agricole de Bréhoulou Quimper Fouesnant
Sylvie Malgorn, enseignante en espagnol, Lycée agricole de Bréhoulou Quimper Fouesnant
Armelle Laine-Penel, chargée de missions nationales d’appui pédagogique – Institut Agro Rennes Angers – Eduter
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Date :6 mai 2024
Mots-clés : Agroécologie, Citoyenneté, Mobilité, Pédagogie de projet, Territoire
Voie de formation : Voies mixtes
Niveau de formation : IV (Bac pro, Bac général)
Initiative du dispositif : Locale
Référent : Eric Plaze ,eric.plaze@agriculture.gouv.fr
Etat de l’action : En cours
Nature de l’action : Innovation
Etablissement National d’Appui : Agrocampus Ouest
Action du Dispositif National d’Appui : Pollen
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