Résultat des innovations
Toutes différentes toutes intéressantes (TDTI) ! Hypothèses de départ
Agrocampus-Ouest, Bretagne
65 rue de Saint Brieuc
35000 Rennes
Tél : 0298944070
Site web : http://www.agrocampus-ouest.fr/infoglueDeliverLive/
Responsable : Christine Sage , christine.sage@agrocampus-ouest.fr
Rédacteur de la fiche : François Guerrier, Intervenenant sur la mission d’appui pédagogique à l’enseignement agricole
, francois.guerrier@agrocampus-ouest.fr
DESCRIPTION SYNTHETIQUE DE L’ACTION
Adossé à un projet de recherche-action mené conjointement par AGROCAMPUS-OUEST et le GERDAL sur les bassins versants du Couesnon et de la Haute-Rance, et ayant pour but la production de connaissances sur l’évolution des pratiques agricoles dans ces territoires, Marion Diaz (DIALOGUE/GERDAL) et François Guerrier (AGROCAMPUS-OUEST) ont accompagné deux établissements pour concevoir et animer un dispositif pédagogique pour apprendre à questionner ce qui fonde les choix des agriculteurs, à s’intéresser à l’autre et à la différence, et à apprendre à partir de la diversité des expériences de stage.
Des enseignants du lycée de Caulnes 22 (Sandrine Poulet, Erwan Bariou, Benoit Jamet, Rémi Goupil) et la MFR de Fougères 35 (Jean-François Olivier) ont pu participer à une réelle co-ingénierie du dispositif pédagogique, chacun apportant ses idées, ressources, opportunités ou façon de faire.
Nous avons pu tester et faire vivre une expérience originale aux classes de Bac Pro CGEA pour les amener à travailler en groupe de développement, en les considérant (au double sens du terme !) comme de futurs agriculteurs et agricultrices afin de produire de la connaissance au sujet des principales préoccupations de leur maitre de stage et des solutions mises en œuvre où imaginées sur le territoire.
Ce faisant, ces élèves ont appris à poser et à se poser des questions, à comprendre la logique de leurs maîtres de stage et de leur système d’exploitation, à comparer différentes alternatives (alimentation, techniques, …), mais également à partager, à s’écouter et à apprendre en coopérant.
Hypothèses de départ
Les sociologues du GERDAL ont montré que les changements de pratiques des agriculteurs ne relèvent pas de motivations ou de volontés individuelles, mais sont plutôt le résultat d’un processus de transformation de normes professionnelles et de production de connaissance issue d’abord du dialogue entre agriculteurs. Accompagner les transitions agroécologiques revient donc à aider les agriculteurs à dialoguer entre eux sur une situation problème pour chercher ensemble les solutions adaptées (Ruault and Lemery 2009). Ce cadre théorique du changement et les outils méthodologiques développés par le GERDAL sont utilisés par certains conseillers agricoles dans leur travail avec les agriculteurs (Darré 2006), comme cela a été le cas dans la recherche action prospective sur l’avenir de l’agriculture dans deux bassins versants bretons.
Mais peut-on utiliser ces méthodes avec les futurs agriculteurs ? C’est le pari que nous avons fait avec deux établissements de l’enseignement agricole : le Lycée de Caulnes et la MFR de Fougères. Face aux constats des enseignants et formateurs d’un « manque de curiosité ou d’ouverture » de leurs élèves qui se traduit notamment dans l’attitude et l’engagement en cours et dans l’épreuve du rapport de stage, et dans le contexte du plan national « Enseigner à produire autrement » de la Direction générale de l’enseignement et de la recherche (DGER) nous avons expérimenté un dispositif pédagogique s’appuyant sur l’expérience de stage des élèves. Notre ambition partagée était de contribuer à la prospective locale sur l’avenir de l’agriculture tout en proposant des situations d’apprentissage mettant en jeu la diversité des situations et des expériences des élèves, et concourant à susciter un état d’esprit pour apprendre à penser et agir autrement (Mayen 2013). Ce dispositif est intitulé « Toutes Différentes, Toutes intéressantes » (TDTI) ; il s’appuie à la fois sur les travaux du Gerdal dans l’animation des collectif d’agriculteurs et de ceux réalisés par le dispositif national d’appui (DNA) dans cadre de l’ancrochage scolaire (Collectif 2017).
Quelques résultats
En ce qui concerne l’évolution des élèves, les enseignants qui ont participé à la mise en place du dispositif font le constat que l’échange d’expériences entre élèves permet d’aborder plus facilement des notions du programme, en s’appuyant sur leurs exemples, leurs questions.
De plus, le dispositif est également efficace pour mobiliser les élèves dans les apprentissages, en particulier les élèves issus du milieu agricole ou en alternance et qui sont déjà empreint d’une norme professionnelle locale. Dans ces cas comme dans le cas des agriculteurs, le dialogue autour de variantes de normes permet bien souvent de développer une analyse systémique du changement de pratique pouvant aller jusqu’à un changement dans la façon de voir les choses. En revanche, l’animateur doit être très attentif à l’hétérogénéité dans les connaissances techniques entre élèves pour éviter les décrochages des élèves non issus du milieu agricole ; En effet, ces derniers ne connaissent pas ou pas encore assez certaines pratiques pour faire des hypothèses sur les conséquences systémiques de la mise en œuvre de cette pratique.
Il semblerait que ce soit alors la solidarité développée dans le groupe autour de l’intérêt de coopérer pour apprendre et d’apprendre en coopérant qui amène les « plus expérimentés » à expliquer aux « novices ». Ils en tirent alors de la reconnaissance mutuelle et un sentiment d’utilité.
Enfin, les enseignants témoignent d’une évolution dans la cohésion du groupe classe avec un envie de renouveler les échanges entre élèves et la recherche de solutions pour apprendre.
Du côté des enseignants, les questions qui se posent varient notamment en fonction de la discipline enseignée, de la place institutionnelle dans l’établissement et des questionnements de l’équipe pédagogique et de direction avant notre intervention. Mais pour tous, une question centrale concerne l’organisation en équipe pluridisciplinaire pour couvrir les différentes questions posées par les élèves.
Nous avons pu identifier certains facteurs qui ont favorisé l’élargissement de la mobilisation des enseignants autour du dispositif comme par exemple :
- Le cadre de la recherche-intervention qui invite à une collaboration et à un partage de responsabilité entre chercheurs et enseignants ;
- Les 1/3 temps pédagogiques qui permettent d’établir le partenariat, de construire le dispositif à partir des préoccupations des enseignants mais avec des exigences issues des travaux antérieurs de recherche en sociologie et sciences de l’éducation ;
- Mettre les élèves en situation de médiateur avec les autres enseignants en leur demandant de présenter les résultats de leur travail, témoins de la progression des élèves ;
Pour aller plus loin nous souhaitons pouvoir approfondir ces travaux en conservant l’esprit de construction partenariale entre élèves, enseignants et intervenants pour adapter et façonner le dispositif au plus près des possibilités, intentions et centres d’intérêts des acteurs.
En savoir plus :
Notons que ces travaux ont donné lieu à deux fiches témoignages dans pollen pour la MFR de Fougères et le Lycée agricole de Caulnes, qui sont illustrées des paroles des élèves en vidéo.
Pour en savoir plus :
Le témoignage de la MFR de Fougères et la vidéo des élèves de première Bac pro CGEA (7 minutes)
Le témoignage de l’EPLEFPA de Caulnes et la vidéo des élèves (7 minutes)
Le témoignage vidéo des intervenants : genèse, objectifs et premiers résultats (12 minutes) et les différentes étapes du dispositif (7 minutes)
E. Bariou, B. Jamet, R. Goupil, S. Poulet, LEGTA Caulnes
Jean-François Olivier, MFR de Fougères
M. Diaz, DIALOGUE, UMR ESO
F. Guerrier, AGROCAMPUS-OUEST
Remerciements :
Nous tenons à remercier tous les enseignants et personnels qui ont participé à l’élaboration et à la mise en œuvre du dispositif TDTI, les élèves des classes de première Bac Pro CGEA avec lesquels nous avons beaucoup appris et pris de plaisir, et plus particulièrement aux enseignants et formateurs Jean-François Olivier à la MFR de Fougères et Sandrine Poulet, Erwan Bariou, Benoît Jamet et Rémi Goupil au LEGTA de Caulnes.Un grand merci également à Claire Ruault du Gerdal pour ses précieux conseils.
Références
Darré, Jean-Pierre. 2006. La Recherche Coactive Desolutions Entre Agents de Développement et Agriculteurs. Editions du GRET. Etudes et Travaux.
Diaz, Marion, and François Guerrier. 2017. ‘Toutes Différentes, Toutes Intéressantes : Comment Apprendre de La Diversité Des Exploitations Agricoles ?’, In Pour no. 231 à paraître.
Ruault, Claire, and Bruno Lemery. 2009. ‘Le Conseil de Groupe Dans Le Développement Agricole et Local: Pour Quoi Faire et Comment Faire’. In Conseil et Développement En Agriculture Quelles Nouvelles Pratiques, 71–96.
Collectif. 2017. L’ancrochage scolaire, une façon singulière de faire réussir les élèves. Educagri Editions. Praxis
MAAF–DGER 2014. Plan d’action « enseigner à produire autrement ». http://www.chlorofil.fr/enseigner-a-produire-autrement.html
Mayen, Patrick. 2013. ‘Apprendre à produire autrement : quelques conséquences pour former à produire autrement‘ »,. In Pour 2013/3 (N° 219), p. 247-270.
VIDEOS
Date :16 novembre 2017
Mots-clés : Agroécologie, Autonomie, Citoyenneté, Décrochage Ancrochage, Evaluation, autoévaluation, Motivation, engagement, Pédagogie de groupe, de pairs, Pluridisciplinarité (multi), Professionnalisation, dynamique d’équipe
Voie de formation : Voies mixtes
Niveau de formation : VI (4e et 3e)
Initiative du dispositif : Locale
Structure d’appui : Etablissement National d’Appui
Etat de l’action : En cours
Nature de l’action : Innovation
Etablissement National d’Appui : Agrocampus Ouest
Action du Dispositif National d’Appui : Pollen
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